Emigration des Algériens en Europe

S’il n’est pas nécessaire de s’étendre sur les raisons qui ont motivé  l’émigration des Algériens en Europe, il est cependant utile de  rappeler que ces raisons d’ordre politique sont liées à des causes  historiques, économiques et démographiques.  Dès le début de la domination politique et militaire, la France décida  de faire de l’Algérie une colonie de peuplement et y envoya  l’excédent de sa population. Ce furent, en 1848, les proscrits, en  1871 les Alsaciens-Lorrains et en 1905 les paysans du Midi ruinés  par le phylloxéra. D’autres populations méditerranéennes émigrèrent  en Algérie où une nouvelle loi facilitait leur implantation.  Les fellahs, chassés de leurs terres, ne trouvèrent aucune compensation  dans l’industrie alors existante. Sans terre et sans travail, ils  constituèrent la majeure partie de l’émigration vers la France ; durant  la guerre 1914-1918, plus de 120 000 hommes, combattants ou  travailleurs placés sous l’autorité militaire, traversèrent la  Méditerranée. Par la suite, entre 1920 et 1924, l’afflux des immigrants  ne cessa de s’accroître pour les besoins de la reconstruction,  conséquence de la guerre.  A partir de 1936, le facteur démographique devint déterminant dans  l’explication du courant migratoire. La population algérienne,  comme celle des pays du tiers-monde, augmentait rapidement, alors  que le passage de l’économie agricole à l’économie industrielle  devait faire de la France, comme la plupart des pays d’Europe, un  pays d’immigration. C’est ainsi que de 38 000 en 1945, où les autorités  d’alors songèrent à la main-d’oeuvre algérienne pour reconstruire  la France, les départs vers ce seul pays passèrent à 65 000  en 1947 et atteignirent 80 000 en 1948. A cette date, et nonobstant  l’accroissement du nombre de migrants, on comptait près d’un  million de personnes en plus dans les campagnes et 500 000  personnes sans travail dans les villes.  L’émigration s’accentua par la suite et le nombre des Algériens en  Europe atteignit le chiffre d’un demi-million au moment de l’indépendance  de notre pays. Le gouvernement algérien ne tarda pas à  s’en préoccuper et s’attela à la recherche des moyens susceptibles  de résoudre ce problème qui, par ses dimensions, était devenu une  question d’ordre national.  Il s’agissait, d’une part, de préparer en Algérie même les conditions  de travail qui permettraient aux émigrés de retourner dans leur pays  et, d’autre part, de s’efforcer d’améliorer leurs conditions d’existence  et de faciliter leur accès à l’instruction et à la formation professionnelle.  En effet, par leur apprentissage de l’activité industrielle des  pays qui les accueillent et la formation qu’ils y acquièrent, ils sont  en mesure de devenir un élément moteur du développement de notre  pays. Tôt ou tard, ils rejoindront l’Algérie et participeront alors  activement au combat économique, comme ils ont participé  naguère, à partir de pays étrangers, à la lutte libératrice.  Certes, la tâche est immense et les objectifs importants. Aussi, afin  de jouer pleinement le rôle qui lui est dévolu, l’émigration algérienne  en Europe s’est organisée en amicale.  Avec l’appui du gouvernement et des autorités consulaires, elle  entend non seulement apporter à ses membres l’assistance nécessaire  pour élever leur niveau de vie matériel et intellectuel, mais aussi  et surtout leur ouvrir des perspectives d’avenir.